Hélène Hoarau est anthropologue de la santé rattachée à l’université et au CHU de Bordeaux. Elle exerce en cancérologie depuis 1998.
Elle est impliquée dans la LMC à travers différents travaux de recherche où elle a étudié plus particulièrement l’observance thérapeutique.
L’observance, définie comme l’association entre l’adhérence (l’acceptation de la prise médicamenteuse) et la persistance (le suivi de la prescription durant le temps prescrit par le médecin), est un phénomène complexe multifactoriel où interviennent des facteurs :
• socioculturels (par exemple l’âge du malade, sa situation familiale, représentation de la maladie et du médicament sous forme orale),
• économiques (par exemple le coût du traitement),
• médicaux (par exemple les effets secondaires induits par le traitement) et les relations qu’entretient le patient avec le système médical (par exemple s’il
rencontre des difficultés pour entrer en contact avec son médecin).
Tous ces facteurs, et notamment la répétition de leur impact, vont influencer l’observance des malades en agissant également comme des témoins de son usure. Par exemple, si le médicament est
décrit comme une chimiothérapie par l’hématologue, le patient aura souvent des représentations du traitement parallèles à celles décrites par les patients recevant une chimiothérapie en
intraveineuse : « un traitement fort et efficace » ce qui, d’un côté, favorisera l’observance.
Mais en contrepartie, s’appuyant sur cette représentation du traitement fort, les effets secondaires attendus par les patients seront vécus comme des effets impactant énormément leur vie
quotidienne. Par exemple, les patients s’attendent à ce que les problèmes digestifs soient ou ne reflètent pas l’attendu, le patient peut rencontrer des difficultés à se penser malade et donc à
être observant. A contrario, des effets secondaires trop présents peuvent conduire à l’inobservance.
Pour diminuer ou juguler les effets secondaires, les personnes vont donc mettre en place des pratiques et techniques d’observance particulières. Certaines personnes vont ainsi faire d’elles-mêmes
des pauses thérapeutiques ou faire varier la dose de médicament prescrite. D’autres vont avoir recours à des médecines alternatives, changer leur alimentation, employer des compléments
alimentaires, etc. Mais ces recours peuvent parasiter le traitement principal et son efficacité.
Ils peuvent aussi engendrer des comportements néfastes pour la santé comme la mise en place par le patient de régime alimentaire très strict et/ou coûteux (notamment avec des produits délivrés
uniquement sur internet dont l’efficacité biologique – au-delà de l’efficacité symbolique – est contestable).
Dans le but d’améliorer leur qualité de vie et/ou de participer aussi au traitement de leur maladie en étant acteur de leur santé, certaines personnes vont ainsi la mettre en danger. Toutefois,
il ne faut pas oublier que ces adaptations du patient au traitement et à ses effets sont l’expression de son autonomie dans la gestion de son traitement par l’action.
Extrait du 2e Livre blanc des États généraux de la LMC. Vous pouvez télécharger ce livre blanc gratuitement ici : https://www.lmc-france.fr/au-service-du-patient/le-2nd-livre-blanc-de-la-lmc-1/